Entretien avec Sœur Marie-Martine, bénédictine du Sacré-Cœur de Montmartre
Qu’est-ce que le temps d’adoration ?
Adorer, c’est accueillir la présence du Seigneur qui se donne à nous dans l’hostie consacrée. La prière d’adoration prolonge l’eucharistie célébrée au cours de la messe. De manière mystérieuse, Dieu a voulu nous rejoindre à travers les sacrements, et particulièrement dans l’eucharistie. À travers le pain et le vin consacrés, réalités concrètes, il se fait présent au milieu de nous : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang » dit Jésus à ses Apôtres dans le récit de l’institution de la Cène. Cette parole n’est pas une équation scientifique ! Elle nous dépasse complètement. Même si on sait que l’hostie est consacrée,elle garde cette apparence de pain pauvre. Nous devons faire confiance au Seigneur quand il nous dit qu’il demeure avec nous de cette façon.
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À qui s’adresse-t-elle ?
Dieu se donne à tous, mais ne peut accueillir qu’un cœur qui s’ouvre.
L’adoration s’adresse à tous ceux qui veulent connaître le Seigneur, même pour ceux qui sont dans le doute de la recherche de la foi.
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Comment s’y prendre ?
Avant de se mettre en prière, il est important de se fixer une durée et de s’y tenir. Les cinq ou dix dernières minutes peuvent être difficiles ! Pour commencer, je fais le signe de la croix, je me mets à genoux et je fais silence. Le silence des lèvres, mais aussi celui du corps. J’utilise la respiration pour m’apaiser. Je commence par poser un acte de foi. Je peux répéter : « Seigneur, tu es là » ou redire une parole de l’Évangile pour prendre conscience que je me trouve en sa présence : « Je suis le pain de vie. » Ma prière est rythmée par trois temps : l’accueil de la présence de Dieu, l’action de grâce – le remercier pour ce qu’il fait dans ma vie –, et l’intercession. L’essentiel n’est pas de parler beaucoup, ni de réciter un chapelet ou des prières. Il s’agit simplement de se rendre disponible.
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Quand mes pensées se dispersent…
Il ne faut pas s’en vouloir ni culpabiliser. Quand on s’aperçoit que les pensées se dispersent, on peut transformer notre distraction en prière : « Seigneur, je te remets ce souci » et on revient dans le présent. Si nous pensons à des personnes, il ne faut pas hésiter à les confier au Seigneur… Et revenir à l’acte de foi : « Je suis disponible pour toi. » Peu importe si nous passons une heure à revenir de nos distractions ! Ce temps, nous l’offrons au Seigneur. L’important ne consiste pas à croire que nous avons très bien prié. L’essentiel est que notre cœur soit ouvert.
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Et si je ne ressens rien ?
On me demande souvent s’il est normal de ne rien ressentir de particulier lorsque l’on se trouve devant le Saint-Sacre-ment. Si on ressent une chaleur, une grande joie intérieure, ou que l’on perçoit la présence du Seigneur, on l’accueille. Mais si nous ne recevons pas de grâce sensible, cela ne veut pas dire que nous n’avons pas bien prié ! Ce temps est gratuit. L’essentiel est de se rendre disponible. Quand on se sent « sec », on peut lire la Parole de Dieu. Cette nourriture nous fortifie.
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Ce cœur à cœur peut-il réellement transformer ma vie et le monde ?
Transformer le monde n’est pas la spécificité de la seule adoration eucharistique. Elle ne fait que prolonger la prière de la messe. En revanche, un cœur ouvert à la vie de Dieu transforme le monde et porte du fruit aujourd’hui. Et l’adoration est un moyen pour nous y conduire.